Monsieur Reste-Ici et Madame Part-Ailleurs

Agnès de Lestrade et Magali Dulain

Kilowatt éditions

Monsieur Reste-Ici ne sort plus de chez lui depuis qu’il a failli finir en crêpe sous un éléphant. Pour un clown, c’est balo. Depuis qu’il vit dans la relative protection de sa maison, Monsieur Reste-Ici ne fait rien, ou presque : il « tente » d’apprivoiser sa peur en dessinant. Malheureusement comme vous le savez sûrement, quand on « tente » (=synonyme d’essayer), on a plus de chance d’échouer que d’y arriver.

Donc Monsieur Reste-Ici essaye…essaye…se croyant en sécurité…(raté, essaye encore). Et un jour BIM, Madame Part-Ailleurs traverse son toit et atterrit dans son salon. La dame est vive, spontanée et affamée. Hop le temps d’un repas, d’une nuit réparatrice et la voilà repartie vers d’autres voyages loin d’ici. Elle envoie quotidiennement des cartes postales à Monsieur Reste-Ici qui les lit, ravi de voyager sans quitter son rassurant foyer. (il en oublie même de dessiner des éléphants). Sauf qu’un jour le facteur est malade, et les cartes sont en stand-by à la Poste. Catastrophe pour Monsieur Reste-Ici qui ne peut se résoudre à sortir.

Il souffre d’un beau traumatisme Monsieur Reste-Ici : phobie de l’extérieur, isolement social, angoisse d’anticipation…En tentant de se protéger, il ne fait que renforcer son appréhension. Se faisant il se coupe du monde. Quelle triste vie !

Le cercle vicieux aurait pu tourner longtemps ainsi : heureusement que le point de rupture est tombé du ciel car il ne risquait pas de le croiser dans la rue. C’est plutôt chouette car ça va être le début de la suite. Un pas après l’autre, Monsieur Reste-Ici va réapprendre à se faire confiance. Le jour où Madame Part-Ailleurs revient le voir (en frappant à la porte cette fois, pas en passant par le toit), il lui montre le clown qui est en lui. Elle rit et c’est le début d’une nouvelle suite car l’amour est de la partie !

Vivre c’est tomber. Vivre des fois c’est échouer. Vivre peut faire très mal.

Qui n’a jamais renoncé à un projet par peur de « je-vais-pas-y-arriver-car-je-me-suis-trompé-dans-le-passé ». Le « j’ai-peur-que-ça-se-reproduise-d’avoir-mal » est normal. Quand le corps a morflé, c’est compliqué. Personne n’aime avoir mal. Et pas nécessairement besoin de se prendre un éléphant sur le coin du bec, il y a des chocs plus subtils et bien douloureux aussi. Cependant pour vivre bien il convient de placer le regard et les ressentis sur ici et maintenant. En restant focalisé sur hier, il y a deux semaines, trois mois, cinq ans, ça déconnecte assurément du présent. Que dire sinon que je suis conquise par cette histoire. Dans le genre métaphore de la vie, y a pas à dire c’est réussi !

Est-ce que vivre c’est tout mettre entre parenthèse pour se protéger ?

Avec ses stratégies d’ultra-protection, est-ce qu’il vit encore Monsieur Reste-Ici ?

Parce que vivre certes ça a son côté obscur pourtant il y a un côté lumineux : comment le raviver ?

Merci Agnès de Lestrade d’avoir fait tomber le facteur malade ! Poussé dans ses retranchements, Monsieur Reste-Ici va découvrir qu’il est capable de dépasser les limites de sa peur pour quelque-chose qui ne relève pas d’un besoin élémentaire (quoi que…). Jour après jour, il progresse, repousse les angoisses limitantes et surprise, d’éprouver des joies pures à simplement être dehors. C’est qu’il en a des ressources !

Sa place perdue dans la vie, il la reprend et plus il la reprend, plus il l’aime. Jolie thérapie !

Avec son écriture toute en bienveillance et grain de folie, Agnès de Lestrade nous offre une histoire de résilience. Nul doute que les « confiances en soi » boitillantes des lecteurs sauront recevoir le message plein d’espoir véhiculé par cette histoire.

D’ailleurs comment résister avec les illustrations joyeusement colorées de Magali Dulain ? Pour les plus observateurs, pensez à comparer la page de garde et la troisième de couverture : elle y a semé quelques sympathiques différences…

Un album fort comme un ami qui viendrait nous prendre par la main pour nous murmurer : tu vas y arriver !

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