Sophie Soleil et Quitterie Laborde
Les P’tits Bérets

Sans connaître l’auteure et l’illustratrice, je suis profondément impressionnée par elles. Pourquoi ? Parce que Le Chant de la Plume m’évoque un kaléidoscope poétique, philosophique, littéraire, surréaliste…et plus encore.
Textes, poèmes et images se subliment les uns et autres en s’offrant éclairage et profondeur.
Que vous dire qui ne paraphraserait pas le livret pédagogique (édité par Les P’tits Bérets, pour ceux que cet album incroyable inspirerait) ?

Voilà pour l’entrée en matière…

Il était une fois (le conte commence) …
Un oiseau chante un immense chagrin : celui d’avoir perdu sa plus belle plume. Rejoint par un elfe, il lui explique la cause de cette tristesse : être tombé amoureux d’une fée qui a emmené avec elle la plume tant aimée.
A seule fin d’aider l’oiseau, l’elfe prend son apparence et se rend auprès de la fée. Il la trouve écrivant des choses merveilleuses avec la plume bleue. La métamorphose ne la dupe pas : elle confond l’elfe qui, démasqué, reprend son apparence. Quand on aime, les artifices n’ont pas de prise…Quand on se sait aimé, on reprend confiance en soi. L’amour de la fée, telle une graine, apaise l’oiseau et lui influe une joie qui lui rappelle…qu’il a des ailes…avec lesquelles tout redevient possible.


Le conte est sage.
Le conte montre les affres du déficit de confiance en soi.
Le conte est métaphorique.
Le conte montre que la plume est peu de chose comparée à la connaissance de ses ressources.
Qu’est-ce qui fait que je suis moi : une apparence extérieure ? La réponse qu’on nous suggère oriente la réponse à cette question vers sa propre lumière intérieure.


Pour enrichir le conte, des poèmes accompagnent les ressentis des différents personnages. Accueillis sur des parchemins, ils invitent à une écoute de la musicalité des mots. En lecture intérieure, ils résonneront peut-être au cœur ou à l’âme du lecteur. Pour le bonheur des yeux, quelques calligrammes ravissent les yeux. Ma sensibilité me porte vers les haïkus, magiques, entre sobriété et graines lancées.
Amis du surréalisme, je vous invite à venir vous immerger dans les illustrations. Les choses deviennent autres, illusions d’un réel, portes ouvertes sur le rêve. Au cœur de l’arbre oiseau, une fenêtre s’ouvre sur un coucher de soleil. Un clin d’œil mythologique vers la tortue qui prête sa carapace aux racines de l’arbre (mais qui donc porte le monde pendant ce temps ?).
Vous l’aurez compris, tout devient possible. (Lewis Caroll, Claude Ponti, Salvator Dali, Olbinski, j’ai comme un fil de pensée qui monte jusqu’à vous…)

L’auteure a mis la poésie au service de l’imagination. Elle se fait fenêtre sur les temps, les époques (coucou la mythologie grecque 😉 ). Passé, présent, futur, conditionnel, impératif, tous les modes participent à cette palette de possibles. Vive la polysémie : richesse infinie des mots qui nous promène de la plume de l’oiseau à celle de la fée poète.
Car s’il y a bien un espace où tout est possible, c’est en poésie !

Ode à l’art, à la vie, à notre lumière intérieure, merci Sophie Soleil et Quitterie Laborde pour cet album sensible qui doucement, semble murmurer : « le meilleur arrive, n’aie pas peur de te montrer, mon étoile cachée ».
