Laurence Gillot et Emma Morison
Imane Allouche pour la traduction des dialogues en arabe
Éditions du Pourquoi Pas.

Hana vit au gré des mêmes verbes que tous les enfants : elle dort, mange, joue, apprend sur les bancs de l’école, lit, écrit, taille des crayons, fait ses devoirs, reçoit une invitation pour un anniversaire…

Hana a sept ans.
Hana est une enfant comme tous les autres enfants.
Mais contrairement aux autres enfants de sept ans de son école, Hana n’a pas de foyer, pas d’endroit où se poser au chaud pour faire ses devoirs, pas de lit douillet où dormir en sécurité.

Heureusement, l’histoire nous épargne les nuits à la belle étoile. Chaque soir le même rituel se répète pour assurer une nuit « au chaud ». Comment ont-elles eu l’idée, la mère et la fille, de s’introduire dans ce musée ? Depuis combien de temps font-elles cela ? Mystère… mais au moins ici Hana se réchauffe, et surtout elle se réconforte auprès de Mademoiselle Vole. La gigantesque statue de femme ailée rassure l’enfant et accueille ses confidences. De ses ailes elle abolit les frontières, elle ramène les saveurs des biscuits du pays, le souvenir doux-douloureux d’une vie qui fut heureuse… Fin du demi-rêve quand Hana se réveille un matin avec des bottes de policier devant les yeux.

La précarité de la mère et l’enfant est de celle qu’il est difficilement supportable à lire. Ce sentiment s’exacerbe d’autant plus que c’est la plume sensible de Laurence Gillot qui porte leurs voix, ces voix qui restent délibérément effacées, discrètes le plus possible de peur qu’on ne les renvoie d’où elles viennent. L’intégration doit-elle vraiment être à ce prix ? Car il s’agit bien de cela quand la maman d’Hana se rend à la gare chaque soir après l’école pour que sa petite puisse faire ses devoirs à la lumière des lampes du hall. Ses fameux devoirs sur lesquels elle ne peut pas l’aider car elle parle à peine français.

Hana et sa maman ont le droit d’être en France : les papiers officiels sont en règle. Mais entrer en douce dans un musée pour y dormir, ça c’est interdit. Est-ce que ça y est : le rêve occidental est-il brisé ? On pourrait le croire, jusqu’à l’hésitation qui perce dans l’attitude de Gabrielle, une dame en vert alias la directrice du musée… Et si la grande Mademoiselle Vole avait décidé de venir à l’aide de sa jeune amie ?


Le récit est pudique, poignant. Des phrases en écriture arabe renforcent la portée du texte : pour une fois ce sont les lecteurs francophones qui vont être un peu mis à distance, cette distance au parfum de barrière linguistique que se prennent de plein fouet tous les migrants. Les vies d’Hana et de sa maman ne tiennent qu’à un fil, ce fil qu’Emma Morison fait apparaître ponctuellement, avec ses nœuds, son aiguille, lien ténu avec la vie de là-bas, la vie d’avant et celle de maintenant…


Même si on ne se connaît pas, j’ai le sentiment qu’un peu ce fil nous relie donc… MERCI Laurence, Emma, Imane et l’équipe Pourquoi Pas pour la naissance de ce livre aux grandes ailes, et pour me faire profiter du début de son envol.
Encore une fois mes émotions ont été mises à contribution à la lecture de ce récit. Lire la solitude et l’isolement me bouleverse. Lire le précaire équilibre entre enfance insouciante et insécurité également. Enfin, lire la solidarité et l’amitié me fait… pleurer.
Si vous croisez ce livre, n’hésitez pas, ou pas longtemps…et s’il vous plaît partagez-le !


merciiiiiiiiii pour cette chronique. Bravo.
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