Boléro et Musette

Maylis Daufresne et Baptistine Mésange

Magellan et Cie

Il y avait Juliette et Roméo : aujourd’hui je vous présente Musette et Boléro.

Comment accueillir le vide laissé par la disparition d’un être cher ? Boléro et Musette étaient inséparables, à la vie à la m…ou pas.

Quand Musette tombe de l’arbre et qu’elle ne bouge plus, Boléro panique et s’accroche à la silhouette évanescente de Musette : la laisser partir vers le ciel sans lui : certainement pas ! Il l’attrape et l’enferme dans un sac. Puis il s’enferme dans son terrier.

Pourtant un jour il faut en sortir du terrier pour chercher de quoi manger. Boléro sort avec son baluchon : pas question de le laisser ne serait-ce qu’un instant ! Dehors il croise des amis, Java et ses petits, Mazurka la loutre ou Twist le blaireau. Tous, tour à tour, lui tendent avec délicatesse la patte, l’invitent, essayent de l’accueillir avec son chagrin en bandoulière. Boléro est tenté. Quand soudain il panique : Musette va avoir froid, Musette va être mouillée, Musette va être oubliée : vite dans le terrier. Les jours passent, l’hiver passe, le printemps revient et avec lui, l’envie de profiter avec ses amis. Mais l’insouciance peine à revenir : un peu de légèreté et sitôt Boléro ressent une grande culpabilité. Un jour pourtant, Boléro trouvera comment accorder ses émotions.

La vie est une danse, comme nous le suggère Maylis Daufresne. Certains quittent la piste du bal précocement. Faire cavalier seul semble alors impossible. En tout cas Boléro s’y refuse. Déni et colère : le deuil s’amorce. Puisque la solitude est trop dure à accepter, Boléro s’accroche à son passé :  les souvenirs des jours heureux et le chagrin qui l’étreint sont ses compagnons. Difficile de s’en détourner sans culpabiliser : si je ris, est-ce que ça veut dire que j’oublie ? Pas facile de démêler les émotions dans la phase de négociation puis de dépression.

Comme elle est précieuse la bienveillance des amis. Ils ont compris que le temps était le seul allié de leur ami. Ils sont présents sans brusquer. A quoi servirait de précipiter ? Ainsi, Boléro s’autorise à les rejoindre petit à petit. Personne ne lui tient rigueur de ses doutes, de ses peurs.

Le deuil se décline en plusieurs phases, l’ultime étant l’acceptation. En acceptant d’ouvrir le baluchon, Boléro s’autorise un retour au présent. Un présent qui ne veut pas dire oublier. Un présent ne signifie pas trahir l’amour ou le souvenir. En laissant Musette partir, Boléro admet qu’il peut vivre sans elle. Il retrouve une certaine forme de confiance en lui.  Il veut profiter de ce que la vie et ses amis peuvent lui offrir.

Avec sa délicatesse, Baptistine Mésange pose en image cycle des saisons et étapes du deuil. A hauteur d’enfant, je ne doute pas que ses illustrations tout en apaisement feront leur chemin jusqu’au cœur des plus grands.

Il m’a été difficile d’écrire sur cet album tant il ouvre grand la porte de mes émotions. Que dis-je la porte : les fenêtres, voire les vannes entières si je le laisse faire ! Écrire en pleurant : inédit, et révélateur : c’est que moi aussi j’ai mes baluchons…

Aujourd’hui j’ai mes étoiles : je sais qu’elles sont là, je souris quand elles passent dans mon esprit. Et j’ai envie très de danser avec mes amis : chapelloise, scottish ou mazurka ?

3 commentaires sur « Boléro et Musette »

  1. Oh là là… c’est moi qui suis terriblement émue à la lecture de votre article. Vous parlez tellement joliment de ce livre que j’ai longtemps porté en moi. En vous lisant mon baluchon s’allège encore un peu plus parce que j’ai le sentiment de l’avoir un peu « partagé » avec vous ❤️

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  2. porter son baluchon, oh oui. Merci pour ce livre magnifique. Un texte qui touche énormément et l’illustration, ah l’illustration. Je suis sous le charme. Que d’émotion.

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