Géraldine Elschner et Stéphane Girel
L’élan vert

Oscar se réjouit : avec ses parents ils vont aller passer Noël à la ferme de bon-papa Siméon. En attendant le moment de partir, l’enfant et sa maman s’activent en cuisine. Bientôt, les doux effluves des biscuits tout juste sortis du four viennent leur taquiner les narines. Pendant que son père attelle la charrette, Oscar patiente avec ses pinceaux.

Dehors l’hiver est bien là, avec son ciel gris et ses flocons tourbillonnant doucement. Bien emmitouflée, la petite famille se met en route au rythme de la clochette qui tinte au cou de l’âne Barnabé. L’enfant s’assoupit. Quand il se réveille, la neige tombe en tempête et ses parents sont inquiets. Ils ne reconnaissent pas le chemin… Quand un fiacre débarque brusquement sur le chemin, le petit âne n’a que le temps de faire un écart pour éviter la collision. L’enfant est éjecté dans les airs…


Rassurez-vous, la fin sera heureuse. L’enfant atterrira sur un matelas de neige, l’âne en grand péril au-dessus d’un ravin, coincé dans le vide, sera tiré d’affaire par les chevaux du fiacre. Saine et sauve, la famille et Barnabé rejoindront la maison chaleureuse de Siméon pour y passer Noël…



C’est sans aucun doute un des albums de Noël que je préfère. Parce qu’il n’y est pas question de Père Noël, ni de magie. L’histoire s’ancre dans le réel, dans la parenthèse hivernale d’une campagne de jadis où le blanc et le gris recouvrent tout. Parce que le plaisir de se retrouver se manifeste par la confections de petits gâteaux parfumés de cannelle et de fleur d’oranger. Quelle jolie valeur que la perspective du partage de ce qu’on a confectionné patiemment…
J’aime cet album pour la réelle chaleur qui se dégage de ses pages. Pour le crépitement du feu dans l’âtre alors que derrière les fenêtres, il neige. Je l’aime pour les lueurs de la ferme de bon-papa Siméon qui se devinent au bout du chemin après le presque accident. Je l’aime pour les illustrations enneigées de Stéphane Girel, et pour ce viaduc qui se devine dans le paysage brouillé. Je l’aime pour la délicatesse de la plume de Géraldine Elschner, qui nous prend par la main pour partager ce qui aurait pu être une tranche d’enfance d’Oscar-Claude Monet. Je l’aime parce qu’il me transporte tantôt dans la petite maison, tantôt sur ce chemin gelé. Chaque lecture m’embarque incroyablement…

Il va de soi que j’aime aussi Les arbres de Noël pour le trait d’union qu’il établit entre le célébrissime peintre et notre époque. S’il est davantage connu sous la signature « Claude Monet », le père de l’impressionnisme a aussi été enfant. Amoureux de la Normandie, amoureux de la nature, s’attachant à la représenter non-figée, dans ces pages on rencontre l’humain avant l’artiste.
A la toute fin, on découvre LE tableau : La charrette, route sous la neige à Honfleur. Et juste après, la partie didactique qui accompagne tous les ouvrages de la collection Pont des Arts apporte ses éclairages à propos de Claude Monet.


Merci Géraldine, pour ce conte de Noël où les ingrédients hiver-enfance-Noël-mésaventure-impressionnisme sont si habilement mélangés que je savoure chaque année cette histoire comme un délicieux biscuit doré. Merci Stéphane Girel de si bien marcher sur les pas du maître, et pour rendre magnifique cette ambiance grise avec toute cette neige tourbillonnante, et pour les cadeaux qu’on devine dans le crépuscule du ciel. La vie peut basculer à tout instant. Rien n’est acquis. Alors merci pour ces arbres de Noël, héros modestes qui par hasard auront sauvés une (sainte) famille et un petit âne. Merci enfin pour ce Noël du XIXe siècle, intimiste et familial, émouvant et porteur d’espoir !

J’espère que cet album vous touchera autant que moi…
